Régle numéro 1 pour téléphoner tranquillement [Maryliss]

"Non mamie, je ne reviendrais pas à Londres... Je sais qu'il n'y a plus personne là-bas mais tu sais très bien que je n'aime pas les souvenirs que les rues londoniennes me renvoient... Oui mamie, je fais attention à moi, ne t'en fait pas."

Enfermée dans les toilettes du lycée, téléphone à la main, c'était le seul endroit que j'avais pour converser tranquillement avec ma chère grand-mère. C'était déjà la cinquième fois de la semaine qu'elle m'appelait, disant s'en faire pour moi, tout simplement car j'étais à des milliers de kilomètres d'elle. Elle n'arrivait pas à comprendre qu'après les drames ayant poursuivi ma famille en Angleterre, je ne supportais pas retourner là-bas. Elle ne comprenait pas non plus qu'à dix-neuf ans, j'avais besoin de prendre mon envol pour commencer une nouvelle vie... Non, elle ne comprenait vraiment rien.

"Bon écoutes mamie. Je suis désolé mais je ne vais pas pouvoir rester au téléphone plus longtemps"

A peine avait raccroché que j'entendis des pas claquer contre le carrelage. Toujours enfermée dans les toilettes où j'étais, je craignais que cela ne soit un professeur ayant surpris ma conversation téléphonique. Doucement, j'entrouvrais donc la porte et passa discrètement ma tête en dehors des toilettes pour découvrir le visage de la personne qui venait de faire son entrée.

M'apercevant que l'individu n'était autre qu'une élève, je fus quelque peu rassurée. En réalité, j'avais déjà assez de problèmes comme ça avec les professeurs et le proviseur pour m'attirer de nouveaux ennuis en me faisant prendre en train de téléphoner dans l'établissement.

"Trop tard, j'ai raccroché. Mais, je n'y manquerai pas la prochaine fois que je l'aurai au bout du fil"

Répondis-je à la jeune inconnue, sourire aux lèvres, tout en sortant définitivement de petit endroit clos où je m'étais enfermée.

"Zepplin Jezaël Rheyns... Enchantée de faire ta connaissance"

Je ne sais pas si elle avait déjà entendu parler de moi ou non mais, de mon côté, son visage ne me disait vraiment rien.

Confuse face au silence qui s'installait dès lors entre la dénommée Maryliss et moi, je me tentais à briser la glace en prenant à nouveau la parole. Il est vrai que je ne savais pas vraiment quoi dire mais, j'allais sans doute trouver. Je trouvais toujours quoi dire logiquement.

"Je suis navrée que tu ai du assister à mes colères contre ma chère grand-mère. Je sais que ce n'est pas un comportement à avoir auprès des membres sa famille mais là..."

Alors comme ça, elle parlait quelque peu méchamment à son père et à sa mère ? Je ne sais pas si de mon côté, j'aurais osé parler mal à mes parents. Quoi qu'il en soit, la question ne se posait pas, elle ne se posait plus depuis que je les avait perdu.

"Très bonne question. Hormis sécher les cours qui ne m'intéresse pas. Je fais pas grand chose en fait... La seule chose qui m'intéresse réellement, ce sont les cours d'art dramatique... Et toi, qu'est-ce qui t'as amené dans ce lycée ? "

Sa remarque m'arracha un petit sourire gêné. Je n'aimais guère les gens qui se dévalorisaient de la sorte en pensant que leur compagnie n'intéressait personne. Toute personne avait son propre caractère, son propre comportement et chaque personne méritait d'être connue pour ce qu'elle est. Je ne jugeais personne et savais parfaitement apprécier l'amitié de tout le monde.

"Ah l'écriture. Je m'y suis essayée un jour mais, je dois avouer que ce n'était pas très concluant. Ce qui me passionne plus c'est le théâtre. Monter sur les planches pour se mettre dans la peau de quelqu'un d'autre. Je trouve ça fabuleux... Non, ne t'en fais pas voyons. Je n'ai rien à faire. Et puis, je suis toujours contente de faire de nouvelles rencontres."

"Je comprend tout à fait mais, ne t'en fait pas, je ne suis pas du genre à me moquer des autres".

Il est vrai qu'elle n'avait aucunes preuves pour me croire mais, peu m'importait réellement, j'étais sincère. En effet, je ne jugeais que rarement les personnes et ce, même si l'on pouvait me croire assez rebelle et méchante envers certains. En réalité, dans mon enfance, j'avais subit moqueries sur moqueries quant à une certaine solitude qui me pourchassait. Ne fais pas subir aux autres ce que tu ne voudrais pas subir. Je savais pertinemment qu'être rejeté faisait mal, voilà pourquoi moi-même, je ne rejetais personne.

"Hum et bien non, j'ai fini les cours. Et puis, je n'ai rien de spécial de prévu"

"En effet, les toilettes, c'est pas l'idéal"

Elle n'avait pas vraiment tord. J'aimais faire de nouvelles connaissances, certes, mais apprendre à connaitre quelqu'un entre WC et lavabo n'était pas forcément génial. Jetant un dernier coup d'œil dans le miroir, vérifiant alors si mon visage ne montrait pas de trop ma fatigue, j'entrouvris la porte qui menait au couloir.

"On a qu'à aller au Starbucks ? Enfin, si ça te tente bien sûr !"

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